Comment imposer durablement les standards de votre réseau de franchise ?

Comment imposer durablement les standards  de votre réseau de franchise ?

L’uniformité du système est selon mon expérience l’un des nœuds les plus complexes de la relation franchiseur franchisé. Alors que certains franchisés mettront en avant leur besoin de liberté ou la priorité de satisfaire leurs clients pour expliquer leur tendance répétée à ne pas respecter vos standards, d’autres vous targueront de bien vouloir faire respecter ces mêmes standards afin de d’améliorer l’expérience des clients dans leur ville ou dans leur région.

Chaque réseau possède sa manière unique de faire respecter ses standards, allant de l’acceptation des différences à la lourde sanction financière pour chaque écart. Alors comment s’y retrouver lorsque l’on devient franchiseur ? Quels sont les avantages de l’uniformité au sein d’un réseau et comment simplifier sa mise en place ?

Pourquoi un réseau devrait-il être uniforme ?

La standardisation apparait comme une évidence de la franchise, en particulier dans le domaine de la restauration. Difficile d’imaginer aller dans un Mc Donald’s quelque part en France pour y déguster un Big Mac fabriqué avec un pain et une sauce différente de celle à laquelle chaque client est habitué.

Le géant de la franchise de restauration, doté de 35 000 restaurants dans le monde, connait un succès inaltérable depuis plus de 60 ans. Ce succès, il le doit en partie à sa capacité à entretenir un système efficient, processé et uniformisé. Un système dans lequel les clients se retrouvent sans se poser de question, dans lequel le risque de voir un client se plaindre de la qualité d’un produit ou de l’hygiène d’un restaurant est limité à son maximum.

La standardisation d’un réseau de franchise offre à adhérents un avantage compétitif important et durable qui se divise en quatre piliers : coût, amélioration, formation, expérience.

  • La standardisation des produits permet d’optimiser les coûts du système et d’atteindre le plein potentiel d’un business model. Optimiser le coût des achats de denrées bien sûr, mais aussi les coûts de stockage et la productivité des employés. Le franchisé qui achète des produits que vous n’avez pas référencé diminue insidieusement les achats de vos produits référencés, limitant votre capacité de négociation pour l’ensemble du réseau.
  • La standardisation permet l’amélioration continue d’un réseau en donnant une base de travail comparable à la tête de réseau. Elle facilite la prise de décision et l’utilisation d’outils de management de la performance. Elle aide aussi à prévoir avec plus de justesse les besoins en stock et limite les risques de rupture
  • La standardisation facilite la formation des salariés. Plus les actions d’un restaurant sont simples et limitées en nombre, plus elles permettent d’atteindre des taux de productivité élevés. Cet argument est particulièrement valable dans la restauration, domaine au sein duquel les équipes sont peu qualifiées et le turnover important
  • La standardisation améliore largement l’expérience client et la puissance de la marque en donnant l’image d’un réseau unifié au sein duquel le concept l’emporte sur la concurrence entre les points de vente. Elle rassure

Pourquoi certains choisissent de ne pas respecter les standards

En dépit de ses avantages, la standardisation reste un challenge important pour tout franchiseur, en particulier lorsqu’il entre dans une phase de croissance au cours de laquelle chaque écart peut se propager dans le réseau créant des habitudes difficiles à changer.

Afin d’améliorer l’uniformité d’un réseau, il convient alors de se demander pourquoi certains franchisés ou managers refusent de se conformer pleinement au système, prenant le risque de se mettre en confrontation directe avec la tête de réseau et les autres franchisés.

Il existe selon moi quatre facteurs prépondérants qui poussent le franchisé à sortir du cadre. Quatre facteurs qui parfois se mélangent pour accentuer les écarts et augmenter la résistance du franchisé à vos relances ou sanctions.

Je peux faire mieux que la tête de réseau. C’est une raison que l’on retrouve principalement lors des premières années de la relation franchiseur-franchisé, lorsque franchiseur et/ou franchisé n’ont pas encore appris à travailler ensemble. Le franchisé pense alors que son succès est uniquement lié à ses efforts personnels et s’octroie le crédit de tout ce qui fonctionne dans son établissement tout en renvoyant ses échecs sur le franchiseur (un biais cognitif commun que l’on appelle le biais d’auto-complaisance en psychologie).


Dans ce contexte, le franchisé peut être tenté de repenser le concept à sa manière. Il pense alors corriger les lacunes du franchiseur et reprochera à ce dernier de ne pas avoir fait le travail lui-même.

Dans ce contexte, la sanction n’aidera pas le franchiseur et le mettra dans une situation de défiance vis-à-vis du franchisé qui ne comprendra pas qu’on sanctionne ses « améliorations » de concept et tendra à se renfermer encore plus. Seul l’effet de groupe (la capacité des autres franchisés à remettre en question la démarche du franchisé fautif) et la démonstration par les chiffres (quel est l’impact réel des écarts du franchisé) peuvent avoir une influence sur son comportement. A plus long terme, c’est la capacité du franchiseur à faire passer la relation franchiseur-franchisé vers un autre stade (de coopération, d’échange, d’écoute) qui permettra d’éliminer durablement l’idée que chaque franchisé peut faire mieux que le groupe dans son ensemble.

Ma clientèle est très différente, je dois m’adapter. C’est une raison plus valable que la première et qui demande une réflexion profonde sur le modèle de standardisation. Mc Donald’s n’a-t-il pas accepté de modifier ses produits pour atteindre des marchés culturellement très éloignés comme la Chine, l’Inde ou la France ?  Chaque franchisé pourrait à juste titre vous expliquer que le client Breton diffère du client Niçois, que le client de centre-ville diffère de celui des galeries commerciales, ou que lui a su développer une typologie de clientèle très spécifique.

Tout le monde peut se trouver des différences. Il n’en reste pas moins que le client français souhaitera retrouver le même concept partout en France. Et si chaque franchisé y va de ses adaptations personnelles, vous pouvez dire adieu à votre image de marque, aux marges de votre réseau, et à vos standards de qualité.

Il convient alors selon moi de donner une marge de manœuvre encadrée au franchisé et d’apprendre au réseau à s’auto-limiter.

La marge de manœuvre dépendra de votre activité et de votre mode de gestion. Elle peut passer par une gamme sensiblement plus large au sein de laquelle le franchisé à le choix, ou par des options locales restreintes sur certains produits. Ces possibilités doivent faire partie intégrante de votre formation et de votre manuel opératoire. Elles doivent répondre à des standards identiques au reste de votre gamme.

En parallèle, il est utile de communiquer sur les écarts et sur leur impact pour le réseau (on peut par exemple penser envoyer chaque mois au réseau un classement des restaurants ayant le moins respecté le concept). Les franchisés les plus respectueux, dont les chiffres sont souvent les meilleurs, y verront une menace pour leur activité et vous soutiendront pour rétablir l’ordre au sein du réseau.

Je ne savais pas vraiment qu’il ne fallait pas le faire. Le franchiseur est bien souvent à l’origine des écarts. Par un manque de formation et d’automatisation de ses processus.

La formation des franchisés et de leurs équipes sur le concept et ses évolutions doit permettre d’intégrer des méthodes simples et de comprendre pourquoi la gamme a été construite. Elle participe activement au respect du concept. La difficulté principale du franchiseur provient généralement de la formation continue (sa capacité à former l’ensemble des franchisés aux évolutions du réseau et de faire passer la formation jusqu’aux équipes des franchisés). Cette partie fondamentale demandera généralement des outils (vidéos, programmes de formation, micro learning, etc.) et de la communication (visant à augmenter le taux d’utilisation de vos outils).

Sur ce thème, j’ai tendance à favoriser la facilité d’utilisation et d’accès. Nous avons testé de nombreuses solutions pertinentes sur le plan technique mais qui ne favorisaient pas l’adoption par les salariés, pour finalement retenir une solution simple mais unifiée et accessible sur n’importe quel téléphone mobile.

L’automatisation intervient là où la formation ne suffit pas. Moins le franchisé et ses équipes ont d’interventions manuelles à faire pour respecter votre concept, plus celui-ci sera respecté. On parlera tant d’automatisation des processus (contrôles des marges, contrôle d’hygiène, processus de merchandising, processus marketing) que d’automatisation des produits (outils d’assemblage, produits préassemblés).

Au-delà de ses défauts (ce parti pris n’engage que moi), le système Subway est un bon exemple d’automatisation des fabrications avec des fours préprogrammés, des pistolets doseurs de sauce et des barquettes de dosage des viandes et poissons pour éviter les surdosages. Il ne laisse naturellement que très peu de possibilités aux franchisés de faire autrement.

Conclusion : et la sanction la dedans ?

Se pose régulièrement la question de la sanction lorsqu’on parle de dérives de franchisés. Les modèles anglo saxons des années 90 en sont friands et envoient des mises en demeure ou sanctions financières pour tout et n’importe quoi.

Même si le système peut sembler intéressant sur le papier et donne un sentiment de pouvoir sur le respect des standards, il faut se souvenir que la sanction pose deux problèmes :

  1. Elle crée de la distance avec les franchisés et ne permet pas d’accéder à des stades de relation pérennes. Le franchiseur ne résout pas les problèmes de fond et se contente de montrer ses muscles pour faire peur au franchisé
  2. Comme pour les automobilistes qui accélèrent avec fierté juste après leur passage devant un radar, le franchisé débordera d’inventivité pour contourner votre système tout en échappant aux sanctions. Une situation absolument contre-productive pour le développement du réseau.

Nous avons tous (à ma connaissance) des problèmes de respect des standards au sein des réseaux de franchise. Stratégiquement, il faut savoir aborder cette problématique avec recul pour la faire progressivement disparaitre dans le temps tout en continuant d’assurer le maximum de satisfaction pour vos franchisés (car cela doit rester l’objectif numéro 1).

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